Extrait 5
- Paul Caudan
 - 12 déc. 2022
 - 2 min de lecture
 
Dernière mise à jour : 20 déc. 2022
Béat d’admiration, Onieta se tourna vers son ami Syn, qui lui rendit son sourire d’un air entendu: par les Dravlaks, qu’ils aimaient le cirque !
Soudain deux mains les tirèrent violemment de leur rêverie.
Un jeune homme aux cheveux mi-longs et tressés leur faisait face, de quelques années leur aîné. Et visiblement furieux.
— Mais qu’est-ce que vous foutez encore là ?! C’est pas vrai ! Allez allez, bougez-vous !
Il les traîna par le col jusqu’aux coulisses. Sa colère ne faiblissait pas, alors qu’il les poussait dans un recoin sans ménagement. Attiré par les éclats de voix, un vieux barbu trapu fit son apparition. Il s’avança en replaçant machinalement ses longs cheveux gris et nattés derrière ses larges épaules. Sakhal Oronn, le maître des lieux lui-même.
— Qui y a-t-il Emeg ? demanda l’ancien avec une sérénité désarmante.
— Ils viennent seulement d’arriver ! On ne peut pas leur faire confiance oncle Sakhal ! Je l’avais dit depuis le début, accepter des étrangers au clan c’est une erreur ! Ils n’ont rien à faire ici et j…
— Ça suffit, coupa Sakhal avec autorité. Ce n’est pas le moment. Va, je m’en occupe.
Le vieillard braqua ses yeux bleu pâle sur les fautifs. Ils n’en menaient pas large devant le souverain incontesté du Cirque Nomade. Son visage s’adoucit.
— Les garçons, c’est à vous dans quinze minutes.
Ils se changeaient aussi vite que possible. Dans la précipitation, Syn avait manqué de déchirer son pantalon de scène en se trompant de jambe, et Onieta s’était déjà pris deux fois les pieds dans les cordages intérieurs du chapiteau. Avec une respiration plus saccadée qu’ils ne l’auraient souhaitée, ils s’échinaient à enfiler leur veste sans accident supplémentaire. Sous les effets cumulés de l’effort et du stress montant, leur cœur battait à toute vitesse, et l’adrénaline se déversait dans tout leur corps.
— Syn ? dit Onieta d’une voix mal assurée. Et si Emeg avait raison ? Est-ce que c’est vraiment notre place ? On n’est pas des Nomades, on n’est pas nés là-dedans nous…
— On en a déjà parlé, fit Syn en enfilant une manche. Pour toi comme pour moi, c’est le cirque qui nous a fait vibrer ces dernières années, une vraie bouffée d’oxygène ! Tu te souviens comment on était avant ? Des pantins sans âme, des victimes passives. Tu voudrais vraiment revenir en arrière ?
— Non… mais… je sais pas… et si on se rate devant tout le monde ? Et si jamais quelqu’un nous reconn…
— Et si on éblouit tout le monde ? Ecoute, c’est le trac, c’est normal. Et il paraît même que cela vient avec le talent, fit-il avec un clin d’œil.
— Merci c’est gentil, concéda Onieta en finissant de boutonner sa veste.
Il se détourna et observa dans la glace le petit être rondouillard qui le regardait avec les lèvres pincées. Il devait admettre qu’il avait fière allure dans son costume d’acrobate.
— Je ne sais pas ce que je serai devenu sans toi Syn, confia Onieta. Tu es mon seul ami.
Syn prit chaleureusement le jeune homme par les épaules.
— Toi aussi. Allez, c’est pour ce grand soir qu’on fait le mur depuis quatre ans, c’est le moment de montrer à la galaxie de quoi on est capables !




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